[Yaoi/Hétéro] La décadence du monde [En cours]

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

Je me faufile dans les ombres de ce niveau qui me répugne plus que tout. Je ne veux pas rester trop longtemps ici, c'est un peu trop dangereux. Le monde dans lequel je vis est séparé entre l'enfer et le paradis. Là, je me trouve dans la partie la plus profonde du Tartare. En ce qui me concerne, je vis plus haut, bien plus haut, mais je vous expliquerai plus tard. La seule chose à savoir pour le moment, c'est que je ne devrais pas être là, en ce moment, surtout pas en pleine nuit. Je pousse un profond soupir alors que je cherche à éviter les habitants de cet endroit. Ils sont dangereux et je ne sais pas me battre. Après tout, je suis un scientifique.

Je m'appelle Taguchi Kazuki et, comme je vous l'ai déjà dit, je suis un scientifique, même si je n'en ai pas vraiment l'apparence. J'ai les cheveux blonds, assez longs puisque certaines de mes mèches arrivent jusqu'à mes omoplates. J'ai les yeux marron, mais j'aime porter des lentilles bleu acier. On me permet quelques excentricités vu mon niveau intellectuel. Ici, toute déficience génétique est punie, alors mes cheveux sont bien noirs à la base, comme le veulent mes origines, mais j'avais envie de changer de look alors je me suis amusé. De toute façon, vu les projets dont je m'occupe, ils ne peuvent rien me dire.

Si je me trouve dans cet endroit qui me dégoûte, c'est parce que je suis, en quelque sorte, en mission. Ici se trouvent les rebus de la société, les gens atteints de maladie mentale, ainsi que nos expériences ratées. C'est d'ailleurs à cause de l'une d'elle que je suis ici. Je tiens un bébé dans mes bras. Il est né il y a à peine quelques jours et il ne survivra pas beaucoup plus longtemps. Quand je trouve un coin assez sale et assez éloigné des endroits que fréquentent les monstres qui hantent ce niveau, je dépose mon fardeau au sol et repars en sens inverse. J'ai fait mon travail, je n'ai plus rien à faire ici.

Pour que vous compreniez bien le monde dans lequel je vis, il faut que je vous explique cette histoire de niveaux puisqu'elle régit tout notre monde. Pour commencer, vous devez savoir qu'il y en a dix qui sont plus ou moins habitables. Je vais profiter du fait que je remonte pour vous expliquer comment ça marche. Je suis content de mon rang puisqu'il me permet de voyager presque comme je le veux. Les êtres qui vivent dans les niveaux du fond ne pourront jamais monter, mais même pour ceux vivant au milieu, il est plus simple de descendre que de monter.

Je vous parlais tout à l'heure du Tartare. Cette zone comprend les trois niveaux les plus bas. Ceux qui y vivent sont tous des ratés ou des erreurs de la nature, parfois même les deux. Tout au fond, là où je me trouve, c'est vraiment l'endroit le plus dangereux. C'est là que se trouvent les criminels, les malades mentaux et les expériences ratées qu'il serait trop dangereux de garder plus haut.

Le niveau qui se trouve juste au-dessus, soit le "Niveau 9" est un peu différent, mais je vous en parlerais quand j'aurais passé le contrôle. Je souris au jeune homme qui tient le poste de garde. Il n'a pas vraiment de chance de se trouver coincé ici pour son travail alors qu'il vient de plus haut. Je pose mon doigt sur le petit emplacement réservé à cet usage et j'ai un léger tressaillement quand l'aiguille perfore ma peau pour permettre à une goutte de sang de s'écouler. Je passe ensuite à un scan rétinien. C'est toujours pareil, quand on veut monter, il faut se soumettre à un tas de test et aucun n'est vraiment agréable en plus.

Maintenant que je suis au niveau supérieur, je me dépêche de rejoindre le post de garde suivant. Ils ne sont pas placés au même endroit pour éviter que, en cas de rébellion, les créatures puissent monter trop facilement. Ici, il y a des gens qui sont atteints à la fois de tares physiques et mentales. Ils sont moins dangereux que ceux en pleine forme, c'est pour ça qu'ils vivent un peu plus haut et qu'ils ont de léger bénéfices par rapport à ceux du "Niveau 10". Par exemple, ils ont droits à trois heures de soleil par jour, soit une heure de plus que ceux d'en-dessous. Les restes sont aussi d'une qualité un peu plus élevée. Dans le Tartare, il n'y a vraiment rien, pas de magasins, ni d'établissements de soins. Ils survivent par leurs propres moyens.

J'arrive enfin au passage suivant et refais la même chose que tout à l'heure, ce qui me permet d'atteindre le "Niveau 8". C'est le tout dernier niveau du Tartare, ou le premier selon de quel point de vue on se place. Il est bien plus habitable que ceux du dessous. Ici, il n'y a que des personnes ayant un handicap physique, qu'il soit minime ou pas. Vous ne devez sûrement pas comprendre pourquoi ils sont traités de cette manière…

Notre monde est à la recherche de la perfection totale de l'être humain, que ce soit au niveau du physique ou de l'esprit, mais ce n'est pas encore une réussite. Il y a toujours des personnes qui naissent avec une paralysie, une déficience génétique, comme le fait d'avoir les yeux bleus alors que l'on est asiatiques. Toutes ces personnes là sont envoyées ici. Ils vivent avec quatre heures de soleil et ont directement droit à nos restes, autant dire qu'ils sont les mieux servis.

Par contre, pour passer au "Niveau 7", qui est en fait l'étage le plus bas des Limbes, il y a un test supplémentaire, mais celui-là n'est pas désagréable puisqu'il suffit de rajouter une reconnaissance vocale aux tests des autres niveaux. Le lieu où je me trouve maintenant est un niveau qui me rappelle énormément de souvenirs. C'est bien le seul endroit où tous ceux d'en-haut et beaucoup de ceux d'en-bas passent. Je me trouve au niveau des écoles. Ici sont réunis tous les enfants de notre monde, de la maternelle à l'université, sans oublier les écoles spécialisées. Si je dis que ceux d'en-bas ont étudiés ici, c'est parce que leur défaut ne s'est pas révélé tout de suite. Quand on est dans le Tartare, on ne remonte plus, sauf les rares exceptions, dont je fais partie.

Après le contrôle pour le niveau supérieur, Je mets mon premier pied dans le "Niveau 6", celui des ouvriers. Les gens qui vivent ici n'ont malheureusement pas réussi leurs études, mais peuvent travailler, et c'est ce qu'ils font ici, ils sont utiles et vivent juste au-dessus du seuil de pauvreté, même si certains s'en sortent un peu mieux que d'autres. De toute façon, il y a les aides sociales pour les maintenir à flot. C'est aussi ici qui se trouvent les maisons de retraites, mais ne croyez pas que ce monde est comme celui que vous connaissez. Il n'y a pas d'âge défini pour les retraites, c'est uniquement lorsque vous ne pouvez plus travailler que vous vous y retrouvez, mais c'est déjà mieux que rien.

Le niveau supérieur que je suis en train de traverser, c'est le "Niveau 5". Pour vivre et travailler ici, il faut avoir un diplôme. Le niveau de vie y est déjà nettement supérieur par rapport à celui du "Niveau 6". C'est toujours gratifiant pour une famille de voir l'un de ses enfants arriver jusque-là, mais moi qui suis un scientifique et qui ait donc des diplômes, je ne vis pas à cet étage. Je viens d'encore plus haut. Ici, il y a les chefs des petites entreprises, les gens ayant fait des études plus poussées, mais pas des têtes, comme moi.

Je passe encore un autre barrage pour atteindre le "Niveau 4", celui-ci est très particulier. Il permet aux familles des personnes qui se trouvent dans les Champs-Élysées de mener une vie confortable. Mais cela ne comprend pas tous les niveaux, ceux de tout en-haut ont un statut totalement à part. je me sens déjà bien mieux à cet étage et je pousse un petit soupir de soulagement en me disant que je vais bientôt retrouver mon niveau. J'avoue que j'aurais préféré que l'on confie cette mission à quelqu'un d'autre, même si je sais que ce que j'ai fait est bien. Ah ! Pendant que j'y pense, c'est aussi à ce niveau que vous trouverez les artistes, même s'ils ne sont pas nombreux.

J'atteins enfin le poste de garde entre les Limbes et les Champs-Élysées, mon passage ici sera un peu plus long puisqu'il faut que je réponde à un questionnaire informatique très pointu qui concerne ma petite personne, et il doit y avoir une cinquantaine de questions. Je n'ai que ça à faire, franchement. Dire que je pourrais être bien au chaud, sous la couette, avec mon compagnon, enfin, colocataire pour l'administration de ce monde. Vous vous demander sûrement pourquoi nous nous faisons passer pour des colocataires alors que nous sommes en couple. Et bien, c'est simplement parce que je n'ai pas envie de me retrouver dans le fin fond du Tartare à cause de mes préférences sexuelles. Ça, ça ne regarde que moi… et mon compagnon.

Je pénètre dans le "Niveau 3" et décide de faire un petit détour. Puisque je suis ici, autant aller faire un petit tour au Temple. Cet étage est un gigantesque lieu de culte où nous nous rendons pour vénérer nos Dieux qui, pour nous remercier de notre dévotion, nous envoie des élus. Je m'occupe d'ailleurs de l'un d'eux et c'est de là que vient mon statut si spécial. Cet endroit est particulier aussi car tous les habitants des Limbes et des Champs-Élysées sont passés par ici. C'est là qu'on lieu les naissances et les enterrements. Pour ceux du Tartare, ils n'ont qu'à se débrouiller. J'entre dans le Temple de Poséidon et vais m'incliner face à l'autel pour y faire une prière muette. Je le remercie de m'avoir protégé dans ma descente et de m'avoir permis de retrouver mon foyer sain et sauf.

Une fois que c'est fait, je me dirige vers le "Niveau 2" où il me reste quelques petites choses à faire. C'est ici que se trouvent les camps d'entraînement militaire ainsi que celui des élus. Il y a aussi les centres scientifiques, mais nous vivons au "Niveau 4". J'aime cet endroit, il est parfait pour moi. Je peux y faire autant d'expériences que je veux et elles me sont toutes accordées par nos dirigeants qui, eux, vivent au "Niveau 1" avec leurs familles. Ils ont un statut à part et les personnes qui travaillent pour eux sont, comment dire ça, sous contrôle. C'est un endroit où je vais rarement, à moins d'y être appelé, bien sûr. Heureusement, ce n'est pas le cas ce soir, ce qui me permet d'avoir encore un doigt intact.

Je suis obligé de repasser au laboratoire pour effacer certaines traces de mon acte, enfin, ce sont plutôt celles du bébé. Il ne doit pas avoir existé. Il n'a jamais vu le jour et surtout, il n'est pas le fruit de l'une de mes expériences. Je supprime toutes traces informatiques de mon dossier, puis c'est au tour de mon dossier papier qui va visiter la déchiqueteuse. Je prends ensuite les lamelles de papier dans un petit sac que j'irais brûler avant de redescendre. Je vérifie une dernière fois qu'il ne reste pas la moindre trace de mon acte, puis je quitte le laboratoire, un petit sourire satisfait sur les lèvres.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, je vais aller brûler ces papiers et je ne vois rien de mieux que d'offrir cette petite vie aux Dieux. Il rejoindra peut-être le paradis de cette manière. J'entre dans le temple d'Hadès, qui m'a toujours filé la chair de poule et m'approche d'un brasier qui se trouve non loin de la porte. Il y en a plusieurs dans la pièce, mais c'est le plus proche de la sortie et je ne veux vraiment pas m'attarder ici. Une fois que c'est fait, je sors et pousse un profond soupir de soulagement alors que la sensation d'oppression que je ressentais diminue enfin. Il ne me reste plus qu'à retourner chez moi. Finalement, je n'aurais pu sauver aucun de mes doigts, il y en a même un qui a subi une deuxième attaque. Heureusement, je n'ai pas perdu de temps avec le questionnaire puisqu'il n'est là que pour ceux qui montent. Je vous jure qu'il ne faut absolument rien oublier le matin avant d'aller travailler parce que sinon vous êtes sûrs d'arriver en retard.

Bon, trêve de plaisanterie, je vais rentrer au "Niveau 4" car j'avoue que je ne serais pas contre une bonne douche crapuleuse avec mon compagnon, enfin, s'il est encore réveillé, car j'avoue que l'aller-retour ne se fait pas en dix minutes. Je ne sais pas combien de temps j'ai mis exactement, mais quand je suis parti, la nuit venait à peine de tomber, maintenant la lune est bien haut dans le ciel. J'espère qu'il ne s'est pas trop inquiété pour moi. Je farfouille dans mes poches pour arriver à trouver la clé de notre appartement. Je vais me faire discret au cas où il dormirait déjà. La porte s'ouvre en silence et je retire mes chaussures dans le couloir avant d'entrer à pas feutrés dans l'appartement, refermant à clé derrière moi.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

J'étais simplement rentré pour prendre une douche en l'attendant, mais comme il tardait trop à mon goût, j'ai préféré remonter au "Niveau 2" pour rejoindre notre laboratoire. Je ne m'attendais vraiment pas à ne pas l'y trouver… Depuis quelques jours, depuis qu'il est né pour être exact, je m'y suis attaché, même si notre but était d'en faire un être parfait. Il n'est pas encore en âge de se déplacer par lui-même, ce n'est pas possible. Qui a bien pu faire une chose pareille ? Je reste un long moment dans cette pièce qui lui était réservé, à l'abri des regards de qui que ce soit qui se trouve dans le laboratoire. Il doit rester secret aux yeux de tous tant que nous ne seront pas sûr qu'il peut être considéré comme un projet accompli à part entière.

On ? mon partenaire de travail, de vie, de tous les jours… pour ne pas dire davantage de peur d'être pris pour un monstre ou que l'on nous sépare pour cause de pêché… Le monde a beau avoir une politique stricte et, en grande partie, régie par la religion, ça n'empêche pas certaines personnes d'être contre quelques règles mises en place depuis quelques années. Parfois, j'ai l'impression que ça fait deux décennies d'années que c'est comme ça alors que la distinction entre les niveaux avec le rassemblement du Tartare, des Limbes et des Champs-Élysées n'existe que depuis à peine plus de quinze ans. C'est peu me direz-vous, mais tout le monde s'est rapidement adapté, bien que le changement fut plutôt rude et brusque pour beaucoup.

Mes doigts glissent sur le tissu épais de la couverture qui le recouvrait alors que mon regard se voile d'une légère tristesse, mêlée d'une grande interrogation. Je relève la tête pour regarder un peu autour de moi. Je n'ai pas remis la blouse blanche que je porte habituellement pour mon travail, je voulais simplement le voir. J'aime mon partenaire, mais, depuis qu'il est là, je vois en lui l'enfant que je n'aurais jamais, bien qu'il ne soit pas à moi. Ça peut paraître égoïste, tout ce que vous voulez, mais sa présence m'apaise et je sens ce vide se reformer en moi alors qu'il avait réussi à être comblé durant ces derniers jours…

Mes cheveux chatouillent le bas de ma nuque. J'aime les garder un peu long, rien de bien extravagant, juste un peu ondulés sur certaines mèches alors que d'autres sont totalement raides. Ce sont celles-là, d'ailleurs, qui taquinent ma peau. Je passe d'ailleurs ma main pour les repousser de manière légèrement agacée alors que mes lèvres étirées en un sourire amusé trahissent ce sentiment. Je porte un simple débardeur noir. Ma longue veste bleu nuit est restée sur mon bureau le temps de ma petite visite. Pour finir, je porte également un jean gris foncé délavé ainsi qu'une paire de mi-bottes de la même couleur que mon débardeur. La petite chaîne en argent que je porte simplement autour du cou est ornée d'un anneau en or blanc qui ne parvient pas à rester sous le col de mon débardeur. Il est un peu trop bas par rapport au bijou, mais ce n'est pas très important, je suis seul ici.

Vous vous demandez pourquoi je reste là, à ne rien faire, à ne pas chercher, mais en fait si, je cherche. Je cherche à comprendre et le possible responsable de cette disparition est la seule personne qui soit au courant en dehors de moi est mon partenaire. Il ne ferait jamais ça, il n'oserait quand même pas ? Je soupire alors que, malheureusement, je suis en train de me dire que c'est possible. Il est tellement obéissant aux ordres de notre supérieur, mais je me conforte dans l'idée que ce dernier n'est pas au courant de notre projet. Du moins, je ne lui en ai pas touché un seul mot vu les conditions dans lesquelles il s'est déroulé.

Je ne sais pas depuis combien de temps je suis ici, mais maintenant que je suis sorti de mes réflexions, le silence pesant commence à m'énerver, sans parler du bruit que fait la trotteuse dans la grosse pendule de la pièce, comme si elle voulait montrer qu'elle est là et qu'il ne faut pas l'oublier. Mon regard se porte d'ailleurs sur elle pour répondre à ma petite question et je soupire une nouvelle fois en constatant l'heure tardive. Il est déjà plus de minuit. Je sursaute et fronce les sourcils en entendant du bruit dans le reste du laboratoire. Je me lève pour comprendre ce qui se passe, mais je décide de me cacher bien vite quand je vois Kazuki entrer.

Je ne sais pas trop pourquoi je me cache alors que je sens mon cœur battre si vite, comme s'il cherchait à me pousser à sortir pour me jeter dans ses bras qui m'ont tant manqué alors que la seule question qui tourne dans ma tête est : Que fait-il ici ? Il ne revient jamais après les heures de travail. Je suis le seul à le faire depuis quelques jours. Je m'en serais aperçu si c'était une habitude pour lui aussi et pourtant, ce n'est pas le cas. C'est bien la première fois. Il a l'air fatigué. Je m'enfonce un peu plus dans l'espace entre l'angle du mur et l'armoire métallique alors que j'ai failli trahir ma présence. Je voudrais comprendre ce qu'il fait là avant de me montrer, même si le plus simple serait de lui poser la question.

Je le vois prendre plusieurs documents, tous concernent ce petit être qui me tient tant à cœur. Mais qu'est-ce qu'il fait ? Il les amène hors de la pièce alors je sors enfin de ma cachette, même si je prends quelques risques. Au moins, il ne va pas vers mon bureau, sinon il aurait vu ma veste et remarqué ma présence. Mes yeux forment de larges soucoupes quand je vois les documents qu'il a pris passer un à un dans l'appareil à découper le papier, comme pour les rendre illisibles, comme s'il voulait tout faire disparaître, comme à chaque fois qu'un projet échoue. Inconsciemment, ma main s'est posée contre ma bouche alors que je me suis reculé silencieusement, jusqu'à rencontrer le mur dans mon dos et je me laisse glisser au sol.

Qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi ne m'a-t-il pas prévenu que quelque chose n'allait pas avec le bébé ? Il sait que je suis attaché à ce petit être qui me paraissait si fragile une fois dans mes bras. Je m'en suis toujours voulu d'avoir usé de certains moyens, disons, peu orthodoxes, mais je me suis dit qu'avec le temps, nous arriverions à nous faire pardonner de tout ça et à nous expliquer sur nos intentions. Mais, s'il a échoué, pourquoi se dire tout ça maintenant ? J'attends qu'il sorte et laisse la colère monter en moi tel le mercure d'un thermomètre qui connaît pour la première fois une grosse chaleur estivale.

À peine entré dans mon bureau, mes mains plaquées sur le verre glacé non loin d'une pile de dossiers en attente d'être étudié par me soins, mon souffle court montre à quel point je contiens ma colère. Je la laisse finalement éclater en balayant le dessus de mon bureau, envoyant tout ce qui s'y trouve au sol et, parfois, contre le mur, comme la lampe qui s'est retrouvée projetée par son poids et par l'élan de mon geste. Le souffle encore plus rapide, mais aussi plus saccadé, mes membres tremblent de plus en plus, comme secoués par des sanglots. Il savait que j'étais attaché à ce bébé et il a tout fait dans mon dos ! Pourquoi est-ce que j'ai envie de ses bras en ce moment, alors que ma main me crie de la laisser partir sur sa joue avec violence. Je la referme fortement en poing alors que l'autre attrape ma veste sur le dossier de ma chaise et je sors rapidement de la pièce pour retourner là où je me sentais si bien que je ne voyais pas le temps passer.

Il fait vraiment sombre alors on ne voit pas grand-chose et, pour être honnête, il n'y a pas grand-chose à voir puisque ça devait rester discret, mais je tenais absolument à garder l'esprit enfantin, comme une petite commode bleue avec quelques affaires de tout âge que j'ai rassemblées bien avant de mettre à exécution ce projet. Il y a aussi un grand lit pour une personne dans lequel il dormait. Nous avions prévu des rebords métalliques pour son jeune âge et pour éviter les incidents. On se voyait mal installer un lit de bébé, puis un lit pour adulte par la suite. Bien que, maintenant, le futur de cet enfant se voit compromis. Un léger sourire a réussi à trouver une petite place sur mes lèvre, mais il disparaît bien vite alors que je me rassieds sur le bord du lit en laissant ma veste tomber lâchement sur le sol.

Ma main retourne caresser le tissu épais de la petite couverture étalée sur le lit, près du coussin plat, et une larme que je ne soupçonnais pas atterrit sur le dessus de ma main, me surprenant. Mon autre main passe rapidement sur mes joues pour effacer toutes traces de cette colère qui semble peu à peu vouloir s'apaiser toute seule. Encore un soupir et je me laisse tomber sur le lit en posant ma tête sur la couverture, puis pose une main sur mon ventre en pressant fortement. Il est douloureux, je ne me sens pas très bien. Je me laisse rarement submerger par la colère, mais là… Mes yeux se ferment et je chercher à me calmer.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

Quand je me retourne en rangeant la clé dans mon sac, je suis soulagé de ne pas trouver mon cher Masayuki derrière moi. Je m'en serais voulu de l'avoir réveillé en rentrant, même si j'avoue que je ne serais pas contre le fait de le réveiller d'une manière bien plus agréable. Vous devez me prendre pour un pervers et j'avoue que je le suis, mais uniquement avec la personne que j'aime et qui, en l'occurrence, doit encore dormir paisiblement. J'avoue que ce n'est pas forcément parce que je le pense que je vais faire déraper les choses. J'ai juste envie de me rassurer et de me retrouver dans mon monde, celui où je suis seul avec lui. Le seul endroit où nous pouvons nous aimer librement, c'est ici, alors je ne vois pas pourquoi je n'en profiterai pas.

Je dépose mes chaussures à leur place, puis monte la petite marche en retirant ma veste, que je dépose sur le crochet prévu à cet effet. Je me dirige ensuite tranquillement vers la chambre en jouant avec l'anneau que je porte autour du cou. Je n'ai malheureusement pas le droit de le porter à l'annulaire, comme je le souhaiterai, mais ce n'est qu'un petit détail. Ce n'est qu'un symbole. Je crois que c'est l'un de mes actes les plus insensés, mais en général, ce qui concerne Masayuki l'est. Que ce soit le fait de lui avouer mes sentiments alors que c'est interdit ou ma demande en mariage tout aussi prohibée, et ne parlons pas de la petite cérémonie où nous n'étions que tous les deux et qui a eu lieu dans notre appartement… Mais je ne regrette rien, bien au contraire, c'est l'un des plus beaux jours de ma vie.

Je pousse silencieusement la porte de notre chambre et reste un peu étonné de ne pas le voir dans notre lit. En plus, les draps ne sont même pas défaits. Je ne l'ai pas vu non plus sur le canapé et je n'entends pas le bruit de l'eau qui pourrait provenir de la salle de bains. Je fronce les sourcils en partant vers la cuisine, peut-être qu'il m'a laissé un petit mot sur le frigo comme on a l'habitude de faire quand on s'absente, mais il n'y a rien. Je ne sais pas trop où il peut être. Quoi que, depuis quelques jours, il a pris l'habitude d'aller voir ce petit être tous les soirs… OH MERDE ! S'il est monté, je suis cuit ! Même si je n'avais pas le choix… C'était un ordre et il fallait que j'agisse sinon c'était une sanction et les risques sont trop grands pour nous deux.

Je baisse la tête en prenant une profonde inspiration, puis je me dirige vers la douche pour me déshabiller et me glisser dans la cabine afin d'allumer le jet d'eau. Je vais tenter de faire comme si de rien n'était, mais je ne suis pas sûr que ça fonctionne. Je n'ai jamais su lui mentir, mais j'avoue que je n'arrive pas à comprendre son attachement à ce bébé. Ce n'était qu'un projet qui a abouti, mais quand notre dirigeant l'a appris à cause de l'une de mes maladresses, il en a eu peur et j'ai été obligé de faire ce que j'ai fait pour ne pas que ça nous retombe dessus. Je ne supporterais pas de perdre mon compagnon. J'espère juste qu'il me pardonnera un jour d'avoir agi dans son dos si je n'arrive pas à lui cacher la vérité. Je l'ai fait pour nous…

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

J'ouvre rapidement les yeux, pris d'un sursaut, et scrute les alentours. J'ai dû m'endormir et tant mieux, vu le cauchemar que je viens de faire. Je soupire légèrement en passant ma main sur mon visage. Ah, tiens, je ne porte pas mes lunettes ? J'étais pourtant sûr que je les portais. J'ai sûrement dû les laisser à l'appartement. Elles ne me servent que pour le travail généralement. Je me redresse pour m'asseoir sur le lit en laissant mes pieds retrouver le sol de la pièce qui paraît si froide dans cette pénombre, si vide aussi… Mon regard se porte à nouveau sur le lit vide de vie et il se voile de tristesse encore une fois, mais la colère se fait plus présente encore.

Je serre le poing alors que je me lève et me penche pour attraper la veste que j'ai laissée tomber au sol sans m'en rendre compte, ou alors, je ne m'en souviens pas. Je me sens un peu lourd. La fatigue de la journée se fait grandement sentir malgré le fait que je me sois laissé aller un petit moment. M'être énervé n'arrange rien à mon état en plus. Je sens ma main crispée trembler un peu , mon regard se porte d'ailleurs quelques secondes dessus, comme si le fait de la regarder pouvait la calmer, mais il n'y a rien à faire.

Je crois que le mieux, c'est que je rentre à l'appartement. Si on me voit ici demain matin, avant l'heure légale de travail, je vais avoir une sanction. Je rassemble les quelques dossiers qui sont éparpillés au sol et les glisse dans une serviette à documents. Il me faut bien une excuse pour être revenu ici en dehors des heures de travail. Je me demande quelle était la sienne. Un profond soupir passe mes lèvres comme pour me calmer alors que j'ai l'impression de voir trouble. Les larmes aux bords des yeux, je ne les laisserai pas sortir, il faut que je me calme. Je vérifie que je n'ai rien oublié dans mon bureau et enfile ma veste pour pouvoir rejoindre le poste de passage de ce niveau.

J'appose mon doigt sur le petit appareil de reconnaissance génétique et digitale, puis avance mon visage près du demi-globe contre le mur qui vérifie mon iris. Je remercie alors le jeune homme qui me laisse passer et entre dans la petite cage de métal pour pouvoir rejoindre le "Niveau 3". Je m'arrêterai bien au temple d'Hadès, mais il se fait tard. Mon regard se porte quand même dans la direction du temple, mais décide finalement de rejoindre le prochain poste qui se trouve à l'opposé. Là, c'est un peu différent, un long questionnaire qui change parfois, mais que j'ai l'habitude de remplir avec le temps, m'attends. Je sors ma carte magnétique qui est la dernière clé pour changer de section de niveau, puis entre dans l'ascenseur qui mène au "Niveau 4".

C'est un tout autre environnement ici, bien qu'il fasse nuit. Ça change des quelques mois qui ont permis la mise en place de ce système, quand il y avait des soldats tous les dix mètres dans les rues. Là, c'est un peu plus tranquille. Je rejoins mon appartement, enfin, notre appartement. Je glisse ma clé dans la serrure et ouvre doucement la porte. Je pose ma serviette au sol en appui contre la petite marche, puis m'accroupis en posant un genou au sol et défais mes bottes afin qu'elles rejoignent les chaussures de Kazuki.

Apparemment, il est rentré. J'entends d'ailleurs l'eau provenant de la douche. Ce n'est pas une heure pour prendre une douche, mais bon, s'il finit seulement maintenant son travail, c'est un peu normal. Je suis tellement en colère que je n'arrive pas à le montrer, je suis trop fatigué pour ça. Je me redresse en retirant ma veste pour l'accrocher sur le porte-manteau contre le mur, puis attrape ma serviette pour aller dans le salon et m'installe. Je règle la luminosité plutôt basse pour ne pas déranger qui que ce soit, puis vais chercher mon ordinateur portable qui est encore dans la sacoche. Il me faut encore un carnet de notes de la journée et je peux me mettre au travail.

Les dossiers bien empilés à côté de moi, mon ordinateur ouvert et allumé, et mon carnet de notes juste à côté de mon stylo, je peux m'y mettre. Je dois reprendre les formules et les différents changements que j'ai observés sur le bébé, même si, maintenant, c'est inutile. Il n'est pas au courant de mon journal de bord, mais ce n'est pas bien important. Au moins, il me reste quelque chose de lui. L'unique chose à laquelle je n'ai pas pensé, c'est de faire des photos. Une nouvelle fois, je sens la colère et la douleur dans mon ventre qui revient. La main qui tenait une feuille dans un des dossiers la lâche pour se presser contre mon ventre alors que je me crispe.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

Je finis de me rincer les cheveux et pousse un petit soupir de contentement. J'avoue qu'une bonne douche après une longue et dure journée de travail, ça fait toujours du bien, mais c'est encore plus le cas aujourd'hui vu que je suis descendu. C'est toujours la même chose quand j'ai une mission qui se passe dans le Tartare, ce qui est assez rare, je l'admets. Je me sens toujours sale après, comme si les infections qui traînent dans ces niveaux m'avaient atteint. Je coupe l'eau et me roule tranquillement dans une serviette après être sorti de la cabine. Je trouve ça étrange que Masayuki ne soit pas encore là, quoi que… il est peut-être rentré sans pour autant venir me rejoindre.

Je soupire à nouveau alors que je prends une autre serviette pour me sécher les cheveux. Une fois que c'est à peu près bon, je la pose sur mes épaules et sors de la pièce, laissant la vapeur se répandre dans le couloir. J'aime bien me balader peu vêtu dans l'appartement, surtout quand il est tard. Je sais que personne ne nous dérangera et que je suis enfin libre d'agir comme je le souhaite. Je ne me balade jamais nu, sauf en de rares exceptions qui ne regardent que mon compagnon et moi. Je ne suis pas totalement exhibitionniste… et puis, avec cette loi que les dirigeants ont tenté de faire passer, je le fais de moins en moins souvent, comme de sortir en serviette.

Il faut que je vous explique. Il y a quelques mois, ceux du "Niveau 1" ont voulu mettre des caméras partout pour pouvoir espionner les gens dans leur intimité, afin de traquer le moindre vice ou la moindre déviance. Si c'était arrivé, je serais déjà au Tartare… et Masayuki aussi, mais heureusement, il y a eu tellement de personnes contre la loi qu'elle a été abandonnée. Certes, les rideaux sont fermés, mais j'avoue que l'on puisse nous surprendre en train de faire l'amour me dérange… que ce soit des amis ou des ennemis, ça doit rester un moment juste à nous.

Je vois une faible lueur provenir du salon et je m'y dirige silencieusement. Mes pieds nus sur le parquet laissent de petites traces humides qui s'évaporent rapidement alors que je m'approche du canapé et de mon compagnon qui a l'air occupé à travailler. Ça me rassure de le savoir ici et en bonne santé. Je n'aime pas quand je ne peux pas veiller sur lui. Je vais me mettre derrière le dossier et déplace doucement les mèches qui balaient sa nuque pour y déposer un tendre baiser, murmurant contre sa peau :

- Bonsoir mon amour.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

Je crois bien que dans ces moments-là, il n'y a que le travail qui parvienne réellement à me calmer, surtout en sachant qu'il est la cause de mon énervement, alors je ne risque pas de le citer. Malgré le fait que je me plonge dans mon travail, je ne peux pas m'empêcher de vouloir entendre et comprendre le moindre bruit, comme le fait que je n'entende plus l'eau couler dans la salle de bains, puis le bruit d'une porte qui s'ouvre. Je soupire légèrement alors que je me laisse aller contre le dossier du canapé en ramenant un pied sur le bord du coussin.

Mon stylo entre les lèvres, une main tenant à demi-ouvert un dossier, juste assez pour le lire, ma main masse légèrement ma nuque douloureuse après une longue journée de travail que je m'entête à prolonger, mais, de toute manière, il le faut. Tous les soirs, si je peux, je retranscris sur mon ordinateur tout ce que j'ai pu relever durant la journée. En bon scientifique que je suis, même si parfois je déteste d'être comme ça, je continue. C'était un rêve d'enfant de le devenir, mais voir ce qu'est devenu le monde me fait maudire cette profession et, en contrepartie, il y a mon guerrier dont je suis, en quelque sorte, le mentor.

Un léger parfum me fait froncer le nez et une légère chaleur qui s'approche de ma peau pour ensuite la caresser du bout des doigts, me faisant fermer les yeux alors que je sens quelques unes de mes mèches se faire repousser pour laisser libre accès à ses lèvres qui ne manquent pas de me faire frissonner. J'attrape mon stylo pour le déloger d'entre mes lèvres, puis je le coince entre mon pouce et les feuilles du dossier pour pouvoir m'exprimer mais aussi le repousser en même temps au niveau de l'épaule, je suppose. Elle est chaude et humide.

- Bonsoir mon amour.
- Va-t-en. Je ne veux pas te voir, Kazuki.

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- Va-t-en. Je ne veux pas te voir, Kazuki.

Je dépose un autre baiser sur sa peau, mais je n'ai pas le temps de faire plus que je le sens me repousser au niveau de l'épaule. Je me demande bien ce qui lui prend. D'habitude, il apprécie ce genre d'attention de ma part, mais c'est vrai qu'il travaille. Je pousse un petit soupir en me redressant, son ordre a été clair mais je ne peux pas me retenir de caresser tendrement sa nuque du bout des doigts en laissant les mèches que j'ai écartées revenir à leur place. Je ne sais pas trop comment agir face à lui et ce sera comme ça jusqu'à ce que je sache s'il m'a vu faire ou s'il s'est rendu compte de la disparition du petit.

Je n'arrive pas à me résoudre à quitter la pièce. J'ai besoin de le voir, d'avoir ces instants que nous ne pouvons avoir que quand nous sommes à l'appartement alors je contourne le canapé pour aller m'agenouiller à côté de sa jambe dont le pied est encore au sol, puis je le regarde. J'ai bien entendu son ton froid et distant. Ça ne me rassure pas du tout, bien au contraire. J'ai peur qu'il soit au courant de ce que j'ai fait et je comprendrais très bien qu'il m'en veuille si c'est le cas. Je vais poser ma main sur son genou en continuant à le regarder travailler. Je cherche à capter son attention durant ne serait-ce que quelques secondes.

Je sens déjà les remords poindre en moi. Mais qu'est-ce que j'ai été con de me laisser surprendre par l'un des dirigeants alors que je travaillais sur les échographies de mon sujet. Je suis incapable de mentir comme je l'ai dit alors j'ai bien été obligé de révéler toute la vérité, mais j'avoue que maintenant, j'aurais préféré subir une sanction plutôt que d'être obligé d'agir comme je l'ai fait. Je ne comprends pas pourquoi nos dirigeants ont peur de ce bébé, ce n'est qu'un enfant. Certes, ses parents sont particuliers, mais ça ne change rien à ce qu'il est. J'aurais dû le confier à l'un des orphelinats du "Niveau 7", ça aurait été beaucoup plus simple. Je me racle un peu la gorge pour attirer son attention et, en même temps, me laisser un peu de temps avant de parler. Je vais continuer à faire l'ignorant pour voir ce qu'il sait.

- J'ai fait quelque chose de mal, Masayuki ?

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Au moins, il n'insiste pas si ce n'est de légères caresses sur ma nuque après un second baiser, mais il finit quand même par s'en défaire et je me concentre de nouveau sur mon dossier. Pour une courte durée malheureusement, car un mouvement me fait me détacher à nouveau de mes réflexions pour le voir s'agenouiller à côté de moi. Le regard las et le soupir qui accompagne ce sentiment me fait baisser la tête sur le côté alors que je laisse ma main retomber lâchement sur l'autre genou tandis qu'il caresse l'autre comme s'il voulait à tout pris que je le regarde. En plus de ne pas avoir envie de le voir, j'ai envie de lui en coller une dans la figure, pour deux raisons maintenant, même si l'appartement est bien chauffé, ça ne l'empêche pas de s'habiller, mais pourtant, il se balade en serviette.

- J'ai fait quelque chose de mal, Masayuki ?

Je le regarde avec une surprise à moitié ironique tant la question qu'il me pose est à la fois malvenue et osée. Il me croit si aveugle que ça ? Je suis rentré après lui et il ne s'est pas posé la question une seule seconde d’où je pourrais être à cette heure-ci ? Un autre soupir et je dépose le dossier sur le canapé alors que je me lève en serrant fortement mon poing. La seule chose que j'ai pu voir, c'est qu'il a détruit les documents concernant le bébé, mais je ne sais pas ce qui s'est passé avant. En quittant le laboratoire à l'heure habituelle, il dormait paisiblement et j'avais même pris le temps de bien le couvrir. Et là, il n'est plus dans sa chambre.

- Je déteste quand tu fais l'innocent.

Je comprends de moins en moins ce qui a pu se passer. Ma voix reste encore et toujours froide vis-à-vis de lui alors qu'au fond, j'aimerais lui faire part de mes angoisses malgré ce que j'ai vu. Je prends le temps de rabaisser l'écran de mon ordinateur et contourne le canapé pour me diriger vers la salle de bains. Sous le coup de la colère que je cherche à retenir, je fais claquer la porte sans prendre la peine de la fermer à clé et retire un à un mes vêtements tout en faisant déjà couler l'eau chaude dans la baignoire. Ça ne peut que me faire du bien.

Une fois totalement nu, je me glisse dans l'eau chaude déjà bien recouverte de mousse et laisse ma tête reposer sur le rebord en laissant un soupir passer mes lèvres. Je ne saurais vraiment le définir tant il y a de sentiments qui se bousculent en moi, de la colère visible par ma main qui se crispe sur le rebord de la baignoire, de la tristesse que j'enfouis bien loin en moi en gardant les yeux fermés pour ne pas laisser les larmes faire leur apparition, mais aussi de la peur. J'ai peur pour ce bébé…

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Finalement, j'aurais préféré qu'il ne me regarde pas. Je sais bien qu'il est en colère contre moi et maintenant, je suis sûr qu'il est au courant de sa disparition. Son attitude est si froide alors que je n'ai qu'une seule envie, le prendre dans mes bras pour le rassurer et le câliner. Il faut que je lui explique pourquoi j'ai agi de cette manière, il faut qu'il comprenne que je n'avais pas le choix. Je le regarde refermer son dossier alors que je l'entends soupirer. Il y avait de la retenue dans son geste, il cherche à se maîtriser et je sais très bien que si je continue de lui cacher la vérité, ça va dégénérer.

- Je déteste quand tu fais l'innocent.

Sa voix me fait frissonner tant elle est froide et je baisse la tête en fermant fortement les yeux. Mais qu'est-ce qui m'a pris d'obéir ? Je me fais la promesse que c'est la dernière fois que j'obéis aveuglément à un ordre sans réfléchir aux conséquences. Si je l'avais amené ici, il ne serait plus au laboratoire et je m'en serais "débarrassé", mais il aurait tout de même fallu que je descende dans le Tartare car je suis sûr que nos dirigeants vont vérifier mes passages demain. Je pousse un petit soupir quand j'entends une porte claquer. Je me perds trop dans mes pensées…

Je me lève, puis pars en direction de la salle de bains quand j'entends le bruit de l'eau, mais je me stoppe devant la porte, je me sens indécis. Je ne sais pas trop comment je dois agir. Est-ce que je dois le laisser tranquille, comme il me l'a demandé, ou est-ce que je dois entrer pour qu'on discute ? Je pose ma main sur le panneau de la porte et ferme les yeux quelques secondes. Il faut que je me décide et si je laisse les choses comme elles sont, ça ne s'arrangera jamais. Lors de notre mariage, j'ai fait la promesse de ne jamais lui mentir et, à part pour lui cacher les quelques surprises que je lui réservais, je m'y suis toujours tenu.

J'ouvre la porte et entre doucement dans la pièce. Il est déjà dans la baignoire, mais je vais quand même répondre à ses attentes un tout petit peu. Il ne veut pas me voir, je ne peux pas le lui accorder tout de suite, mais je peux au moins rester à distance pour ne pas trop le déranger. Je m'assieds sur le sol contre la porte que j'ai refermée, puis prends une profonde inspiration. C'est bien d'être là, mais il faut que je trouve ce que je vais lui dire. Comment expliquer la lâcheté de mon geste ?

- Masayuki, je suis désolé de ne pas t'en avoir parlé, mais je n'ai pas eu le choix. J'ai préféré suivre les ordres pour nous protéger. Si je ne l'avais pas fait, nous aurions été sanctionnés. L'un de nos dirigeants m'a surpris quand je travaillais sur le dossier et, quand il a appris qu'il était né, il en a eu peur. Il voulait que je m'en débarrasse, que je le tue… mais je ne pouvais pas faire ça. Alors, je l'ai emmené dans le Tartare…

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J'aurai dû me douter qu'il viendrait me rejoindre dans la salle de bains, mais, chose étrange, il ne vient pas me faire face. Tant mieux en un sens, je ne veux pas le voir. Je ne veux pas l'entendre non plus et il semble vouloir rester muet. Je me tends de nouveau et m'assieds dans la baignoire, ne pouvant plus rester allongé. Mes genoux pointent légèrement hors de l'eau après avoir ramené un peu les pieds vers moi, puis je laisse mon regard se perdre vers le fond de la salle de bains… Le silence est pesant, mais en même temps, c'est bien ce que je voulais, non ? C'est ce que je déteste le plus chez moi, je n'arrive jamais à me décider totalement.

- Masayuki, je suis désolé de ne pas t'en avoir parlé, mais je n'ai pas eu le choix. J'ai préféré suivre les ordres pour nous protéger. Si je ne l'avais pas fait, nous aurions été sanctionnés. L'un de nos dirigeants m'a surpris quand je travaillais sur le dossier et, quand il a appris qu'il était né, il en a eu peur. Il voulait que je m'en débarrasse, que je le tue… mais je ne pouvais pas faire ça. Alors, je l'ai emmené dans le Tartare…

Il a lâché ça d'un seul coup, sans compter les quelques hésitations dans sa voix vers la fin de ses explications. Au fur et à mesure que ses mots parvenaient à mes oreilles, mon cœur étais sur le point de s'arrêter et maintenant, il bat rapidement. Ma main logée non loin de lui et la tête baissée, je sens les larmes me brûler les yeux, puis rouler le long de mes joues sans plus pouvoir les retenir. Je me sens totalement désarmé par ses mots, j'ai l'impression qu'il pensait le préserver, mais c'est impossible, pas dans le Tartare. Ma main sur le rebord de la baignoire se presse encore plus alors que je me recroqueville encore plus.

- C'est du pareil au même… Kazuki…

Ma voix si tremblante m'étonne. Je déteste me sentir aussi faible et émotif, mais c'est plus fort que moi. J'y tenais tellement. D'un geste rapide, avec l'impression que j'utilise les dernières forces qu'il me reste, je me lève et sors de la baignoire en attrapant rapidement une serviette que j'attache lâchement autour de ma taille pour me laisser tomber sur les genoux en face de lui. Mes mains attrapent les siennes pour les serrer alors que je laisse mon front se poser contre son épaule. Je comprends qu'il n'ait pas eu d'autre choix, mais… pourquoi le Tartare ? C'est pire que la mort, surtout pour un bébé si jeune.

- Il… il me manque… Kazuki… Il me manque…

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- C'est du pareil au même… Kazuki…

Je n'ai pas loupé ses gestes et j'ai tellement envie d'aller le prendre dans mes bras pour le rassurer et le calmer, mais aussi pour m'excuser d'avoir fait une telle erreur. Je pousse un profond soupir et amorce un geste pour me lever, mais quand je le vois sortir de la baignoire, je me stoppe. Je ne sais pas ce qu'il va faire et je préfère attendre plutôt que de le gêner ou de le mettre en colère. Je vois les larmes sur ses joues quand il s'approche de moi et quand il vient s'agenouiller en face de moi pour prendre mes mains et appuyer son front contre mon épaule.

- Il… il me manque… Kazuki… Il me manque…

Je m'en veux tellement pour mon geste que j'aimerais pouvoir remonter le temps pour changer les choses. Je laisse ma tête partir en arrière alors que je détache mes mains des siennes pour pouvoir l'attirer dans mes bras. Je n'ai envie que d'une chose, rattraper mon erreur et arriver à le calmer ne serait-ce qu'un tout petit peu, mais je crois que ce n'est pas possible. Ses mots m'ont serré le cœur et je pousse un profond soupir alors que je cherche à trouver une solution. Il y en a bien une qui me vient à l'esprit, mais je ne sais pas si elle est bonne. Masayuki a tellement peur du Tartare que je ne sais pas s'il me laisserait y retourner pour tenter de retrouver le petit, mais c'est tout ce qui me vient à l'esprit.

- Je vais y aller Masayuki. Je vais retourner le chercher et nous l'élèverons tous les deux. Je suis sûr qu'on peut trouver un moyen…

Je me suis mis à caresser son dos lentement pour tenter de l'apaiser et de me rassurer moi-même. Je sais que mes pensées sont égoïstes, mais je préfère l'avoir dans mes bras pour pouvoir le rassurer plutôt que de le voir aussi froid qu'avant. Il est mon univers, il n'y a que lui qui compte dans ma vie. Je l'aime à un tel point que cela me paraît impossible de l'aimer plus, et pourtant, c'est le cas jour après jour. Alors, le voir dans un tel état, ça me fait mal, et je ne veux pas. Je me rends compte qu'il ne doit pas être le seul à être malheureux. Je me rends compte qu'il y a beaucoup de choses que j'aurais dû faire différemment.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

Mes mains, dont il s'est défait, sont retombées au sol alors que je me laisse doucement bercer par ses caresses dans mon dos, faisant peu à peu se briser les barrières que j'avais faites au fond de moi pour me retenir de craquer. Je laisse les larmes couler en silence, alors que je suis parfois secoué de sanglots et je cherche à me blottir davantage contre lui. Mes mains trouvent aisément son dos comme si je voulais m'accrocher à lui. Je l'ai entendu soupirer et je me rends compte que lui non plus ne se sent pas bien. Il est incapable de mentir et je le crois quand il dit qu'il l'a fait pour nous protéger et qu'il y a été obligé, autrement, il ne l'aurait pas fait.

- Je vais y aller Masayuki. Je vais retourner le chercher et nous l'élèverons tous les deux. Je suis sûr qu'on peut trouver un moyen…

La réaction est aussi brutale que ses mots à mes oreilles. Je me suis vivement détaché de son épaule pour le regarder en même temps que mes larmes se sont taries comme si elles n'avaient pas eu d'autre choix. L'étonnement, mais tout particulièrement la peur, peuvent se lire dans mes yeux. Je retire mes mains de son dos pour les passer autour de son cou et repose ma tête sur son épaule, presque contre son cou, comme pour m'y réfugier. Je cherche à me rassurer, mais aussi à le raisonner sur cette idée démente.

- Non… N'y… n'y va pas… C'est trop dangereux…

Je voulais l'accompagner, mais rien que l'idée de m'approcher du point de contrôle permettant l'accès au Tartare me fait frissonner d'angoisse et trembler de peur. Je cherche d'autres raisons pour l'en empêcher, mais la peur ne me permet pas de réfléchir. J'essaie de me calmer le plus possible pour laisser place à mon calme légendaire, mais sans aucune conviction de ma part. Mes bras se resserrent un peu pour laisser l'une de mes mains rejoindre son épaule et s'y agripper.

- Il y a des caméras… Tu risques d'être vu… C'est trop risqué…

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

J'aimerais tant pouvoir arrêter ses larmes et le voir sourire, mais ce n'est pas possible. Ses mains sont allées se loger dans mon dos et je l'ai encore plus rapproché de moi pour pouvoir lui procurer un peu de ma chaleur. Je ne veux pas qu'en plus de ne pas être bien moralement, il tombe malade. Par contre, il n'a pas l'air de vouloir agir comme je le souhaite, alors, quand il se met face à moi, je lui caresse tendrement la joue pour tenter de chasser ses larmes, ne serait-ce qu'un peu.

Je me rends bien compte qu'il a peur de ma proposition, mais avant qu'il ne remette sa tête contre mon épaule, j'ai au moins pu apercevoir que ses larmes se sont arrêtées de couler. C'est déjà ça. Par contre, ses bras autour de mon cou et tout dans son attitude me font comprendre que mon idée ne lui plaît pas. Je vais caresser sa nuque d'une main alors que l'autre se resserre sur sa taille. J'ai encore une chance de le retrouver, mais pour ça, il faut que je parte maintenant.

- Non… N'y… n'y va pas… C'est trop dangereux…

Comment est-ce que je pourrais le laisser seul alors qu'il a peur ? C'est totalement impossible, mais laisser l'enfant en bas aussi. Je ne veux pas lui demander de m'accompagner, je refuse de lui faire subir une telle épreuve. J'irai seul et je lui montrerai que tout va bien une fois que je serais revenu. Mais je ne partirais pas sans son consentement. Il est hors de question que je le laisse avoir peur pour moi alors que je veux réparer mes bourdes. Je le ferais aussi avec une autre personne, mais ça, je ne sais pas encore comment le faire.

- Il y a des caméras… Tu risques d'être vu… C'est trop risqué…
- Je ferais attention, je te le promets et je trouverais bien un moyen de déjouer les caméras de surveillance. Ce qui pose réellement problème, ce sont les postes de passage.

J'ai plus réfléchi à voix haute qu'autre chose pour la fin de ma phrase, mais c'est vrai que les caméras ont toujours des angles morts, par contre, chaque passage à un poste est enregistré et il faudra déjà que j'explique ma descente de tout à l'heure puisque je n'avais pas à y aller. J'aurais dû commettre un meurtre et montrer le cadavre à mon supérieur, mais c'était hors de question, alors je lui expliquerais mon acte. De toute façon, c'est ainsi qu'on se débarrasse des expériences ratées, mais lui, il était parfait. Je tourne la tête pour déposer un baiser dans ses cheveux, puis murmure tendrement pour tenter de le convaincre :

- Je te promets de revenir en vie.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

- Je ferais attention, je te le promets et je trouverais bien un moyen de déjouer les caméras de surveillance. Ce qui pose réellement problème, ce sont les postes de passage.

Ma peau frissonne à présent par le simple fait d'être en contact avec la sienne. J'aime me sentir entourer par ses bras, simplement par sa présence, sa force qui entoure ma taille et maintenant ce baiser sur mes cheveux. Malgré tout ce qu'il peut vouloir faire pour me rassurer, ses intentions restent tout de même risquées, même inconscientes. Enfin, inconscient est un bien grand mot pour le qualifier car il sait ce qu'il risque, mais il le fera quand même, sauf que je ne veux pas qu'il retourne là-bas. Rien que le fait de savoir qu'il y est allé sans m'en avoir parlé avant me fait froid dans le dos. Maintenant que je suis au courant, il est hors de question que je le laisse faire.

- Je te promets de revenir en vie.
- Je t'en prie… N'y va pas…

Je secoue négativement la tête alors que je me crispe un peu plus, angoissé à l'idée qu'il descende. Quand une expérience est malheureusement ratée, il y a des personnes qui sont nommées pour se charger de les amener au Tartare, c'est pour ça que je n'ai jamais eu peur d'y être envoyé un jour pour une quelconque besogne, même si, au début, mon désir était d'aider toutes ses personnes envoyées là-bas. Mais que faire face au pouvoir de nos dirigeants ? Absolument rien. Je finis par doucement défaire l'étreinte de mes bras pour pouvoir lui faire face. Je suis partagé entre l'envie de le retenir de toutes mes forces afin de le préserver et le laisser y aller afin d'avoir le maximum de chance de notre côté pour pouvoir retrouver l'enfant.

- Moi aussi je veux le retrouver… Je… Je viens avec… toi…

J'ai horriblement peur, mais je ne veux pas qu'il y aille seul, surtout aussi tard. Il fait nuit et c'est plus dangereux encore. J'essaie de prendre un air convaincu de ce que je veux faire. Pourtant, je sais que mon corps tremble à l'idée de descendre, mais c'est la seule condition que je lui impose s'il veut descendre et elle est irrévocable.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

- Je t'en prie… N'y va pas…
- Il le faut pourtant…

Je le sens se crisper à sa main qui se resserre sur mon épaule et son signe négatif de la tête me fait bien comprendre que mon idée ne lui plaît pas du tout. Pourtant, je ne vois pas d'autre solution pour sauver ce petit bout. Je sens son étreinte se desserrer et je lui fais un petit sourire en allant lui caresser la joue pour tenter de le rassurer, mais c'est un peu compliqué alors que moi-même, je ne le suis pas. Je sais très bien que c'est dangereux, surtout la nuit, mais nous n'avons pas le choix et je sais me montrer fort quand il le faut. En plus, j'ai déjà réussi à y aller une fois, j'y arriverais bien une autre fois…

- Moi aussi je veux le retrouver… Je… Je viens avec… toi…

Il essaie de se montrer convainquant, mais je le sens trembler contre moi. Comment peut-il penser que je vais le laisser venir avec moi ? Il a tellement peur. Je ne veux pas qu'il soit terrorisé par notre descente. Je ne veux pas qu'il en fasse des cauchemars, c'est hors de question qu'il y aille. C'est un endroit où je souhaiterais ne jamais avoir à remettre les pieds tant il me fait froid dans les dos et me dégoûte à la fois car je sais que certains des êtres qui y vivent sont dus à nos expériences ratées. Notre monde est fou et je ne comprends pas comment on en est arrivé là. Il y a environ quinze ans, ce n'était pas comme ça et j'avoue que je prie les Dieux pour que ça redevienne comme avant.

Si notre monde n'avais pas évolué comme il l'a fait, je ne sais pas si j'aurais demandé Masayuki en mariage, mais là, avec toutes les interdictions, tous les risques que nous courrions, j'ai voulu lui montrer que je serais toujours là pour lui et que mes sentiments étaient plus forts que tout. Si nous sommes découverts, je prendrais la faute sur moi, je le lui ai déjà dit. Je ne sais pas comment je ferais, mais je refuse qu'il soit puni pour ça, pas parce qu'il m'aime.

Je dévie du sujet, je m'en rends bien compte, mais j'aimerais que vous saisissiez à quel point notre monde ressemble à une prison. Tout ce qui n'est pas dans la norme est interdit : aimer une personne du même sexe, les relations physiques hors mariage, les déficiences génétiques, qu'elles soient physiques ou mentales, et j'en passe. J'aimerai tant vivre dans un monde où la seule loi qui existe, c'est le respect de l'individu et de ses croyances, de ses désirs…

Je finis par revenir à la réalité, me redressant un peu pour pouvoir déposer un tendre baiser sur les lèvres de Masayuki. Je veux qu'il oublie son idée de venir avec moi et, comme je l'ai dit tout à l'heure, je n'irais pas à l'encontre de sa volonté. Je n'ai pas réussi à le convaincre de me laisser descendre seul, alors je n'irais pas. C'est malheureux à dire, mais nous ne pourrons pas sauver le bébé et j'avoue que ça me fait mal au cœur, mais ce n'est rien comparé à ce que je peux ressentir face à la détresse de mon compagnon. Je me détache doucement de ses lèvres pour le regarder à nouveau et reprends mes caresses sur sa joue en faisant un signe négatif de la tête.

- Non, je ne veux pas que tu descendes. C'est trop risqué, et puis, je ne veux pas que tu aies peur. Nous allons aller nous coucher. Je verrais si on peut faire quelque chose demain.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

- Non, je ne veux pas que tu descendes. C'est trop risqué, et puis, je ne veux pas que tu aies peur. Nous allons aller nous coucher. Je verrais si on peut faire quelque chose demain.

Après un baiser et une caresse, il désapprouve ma décision. Je sais que je suis effrayé à l'idée de descendre, mais je tiens à le retrouver. Je soupire légèrement en baissant la tête et me laisse un peu plus aller contre lui, me détendant peu à peu alors que mes mains se posent sur son torse, comme pour avoir un contact, mais aussi un appui. Dormir en sachant que le bébé est en bas, ça me paraît impossible, mais en même temps, la journée, comme toutes les autres, a été longue et l'énervement de ce soir n'a rien arrangé à mon état. Je finis par acquiescer d'un faible hochement de tête.

- Je suis désolé… Je me sens inutile…

Je retourne loger ma tête contre son épaule, presque contre son cou. Je me sens tellement faible en ce moment. En temps normal, dans ses bras, je trouve ça rassurant, mais là, j'ai peur. Des frissons me parcourent le dos alors que je m'assieds au sol sur ma cuisse en ramenant un peu mes jambes pliées contre moi, toujours au sol, comme pour me recroqueviller le plus possible afin de profiter de cette douce chaleur qu'il dégage. Son parfum est enivrant, mais surtout rassurant. Pourtant, ma peur est toujours présente.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

- Je suis désolé… Je me sens inutile…
- Chut, ce n'est pas ça. C'est de ma faute si nous sommes dans une telle situation et j'avoue que j'aurais préféré que ce ne soit pas le cas.

Je n'aime vraiment pas l'état dans lequel se trouve mon compagnon. Je me sens responsable et j'avoue que j'aurai préféré que ce soit différent. Je trouverai une solution demain matin et je crois que j'en ai déjà une, mais il faudra que je demande à mon protégé. Quoi que, non, j'oublie ça, ce n'est vraiment pas une bonne idée. Mais je trouverais ! Je m'en fais la promesse, ainsi qu'à Masayuki. Peu importe le temps que ça prendra.

Il se laisse un peu plus aller contre moi et j'en profite pour glisser un bras sous ses genoux alors que l'autre va se loger dans son dos, puis je le soulève en même temps que je me lève. J'avoue que je peine un peu vu que je ne suis pas très épais, mais j'y arrive et je l'amène tranquillement jusqu'à notre chambre où je l'allonge sur le lit. Je m'occuperai de la salle de bains demain matin. Pour le moment, il est le seul qui compte et je tire la couette pour le recouvrir avant de me glisser à ses côtés. Je vais l'embrasser sur la joue avant de l'attirer dans mes bras pour le serrer fortement en recommençant à lui caresser le dos de haut en bas en de lents mouvements.

- Dors, mon amour, tu en as besoin.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

- Chut, ce n'est pas ça. C'est de ma faute si nous sommes dans une telle situation et j'avoue que j'aurais préféré que ce ne soit pas le cas.

Je suis un peu surpris de sentir son bras se glisser sous mes genoux et, étant peu habitué, je ne sais pas trop comment réagir. M'accrocher un peu plus à son cou ou le lâcher pour l'empêcher de me soulever ? Nous sommes tous les deux presque de la même carrure, alors je dois être lourd pour lui, mais le temps que je réfléchisse, il est déjà debout, probablement en train de se diriger vers la chambre puisqu'il a parlé de dormir. J'enfouis ma tête dans son cou en fermant les yeux jusqu'à ce que je desserre mes bras quand je sens la douceur fraîche des draps.

- Dors, mon amour, tu en as besoin.

Il m'offre un simple baiser sur la joue et me voilà totalement blotti contre son torse. L'une de mes mains s'y est logée dans l'intention de le repousser car je voulais moi aussi l'embrasser, mais trop tard. J'ai réfléchi un peu trop lentement. Je relève tout de même de même la tête pour le regarder. Après la journée que nous avons passée, ne pas me retrouver dans ses bras plusieurs heures me rend presque dingue, mais me rendre compte que je m'y retrouve maintenant pour une autre raison que l'envie de retrouver mon compagnon me peine. Au fond, je suis en colère de ce qu'il s'est passé, mais aussi contre moi car j'ai gâché le seul moment que nous pouvons passer ensemble.

- Toi aussi… Dors, Kazuki…

Je dépose mes lèvres sur les siennes pour un simple baiser et retourne loger ma tête contre son torse en me glissant un peu plus sous la couette, sentant par la même occasion ma serviette se défaire. Pour une fois, nous ne parlerons pas de notre journée comme nous le faisons tous les soirs. Je mangerai mieux demain, n'ayant encore rien avalé. Je me demande s'il a mangé un peu avant quand même. Je ne suis jamais très expressif des sentiments qui me traversent, mais malgré les années passées à ses côtés, je n'ai jamais su l'être davantage. Mais ce n'est pas pour ça que je ne pense pas les mots qu'il me dit souvent.

Je passe mon bras dans son dos et me presse un peu plus contre lui, pris d'un frisson de froid, mais aussi de fatigue. Je me rattraperai demain pour un moment tranquille après une longue journée de travail. Je redoute un peu la journée de demain, mais j'essaie de ne pas trop y penser. Je soupire légèrement en constatant que trouver le sommeil est difficile, même en voulant me concentrer uniquement sur ses caresses dans mon dos.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

J'ai senti l'une de ses mains se poser sur mon torse et je suis allé mettre la mienne dessus. Je veux profiter de ce petit moment où nous sommes encore éveillés pour le regarder et le câliner. C'est quelque chose que nous faisons tous les soirs puisque nous n'avons pas d'autre moment pour profiter de la présence de l'autre. Lorsque nous sommes au travail, c'est totalement impossible, les risques sont trop grands, mais je crois que, au final, c'est une bonne chose. C'est peut-être ça qui fait que notre relation est si forte. Je ne sais pas, mais en tout cas, il est hors de question que je laisse ce moment m'échapper.

- Toi aussi… Dors, Kazuki…

Je profite de son baiser, même s'il me paraît un peu court et je fais tendrement remonter ma main le long de sa nuque pour la lui caresser alors qu'il se détache de mes lèvres. J'aime le sentir s'installer contre moi, sa peau frôle la mienne et me fait légèrement frissonner. Je pousse un léger soupir de contentement d'être enfin dans notre lit. C'est vrai que la journée a été longue, bien plus que d'habitude et j'avais hâte de me retrouver au calme avec lui, même si la situation n'est pas bonne.

Il s'est finalement calé contre moi et je laisse mes doigts jouer avec les quelques mèches qui courent sur sa nuque. J'aime ce geste, ça m'apaise et, en même temps, je trouve ça très sensuel. Ses cheveux sont incroyablement doux et je ne me lasserai jamais de les toucher. Il frissonne et je le serre un peu plus contre moi, laissant ma main quitter la sienne pour la glisser dans son dos et le garder tout contre moi en reprenant mes caresses. Je l'entends et le sens soupirer. J'ai l'impression que Morphée n'est pas pressé ce soir et je crois que je vais en profiter. Peut-être que si j'arrivais à le détendre un peu, je pourrai l'aider à trouver le sommeil.

Je laisse ses mèches pour glisser ma main sous son menton afin de lui faire relever la tête afin de pouvoir aller poser mes lèvres sur les siennes en un baiser tendre, mais dans lequel je laisse transparaître un peu de sensualité. Je ne veux pas aller trop loin, mais j'avoue que j'aime ce genre de contact avec lui et qu'il n'y a rien de mieux pour me faire oublier mes soucis. Mon autre main remonte lentement le long de sa colonne alors que je glisse une jambe entre les siennes. Je veux lui faire oublier durant quelques instants nos soucis. Je veux qu'il se sente bien.

Poussin Messages : 14 Date d'inscription : 11/12/2009

J'ai l'impression d'être un objet fragile et précieux quand il me prend dans ses bras comme il est en train de le faire. Quand il me caresse comme il le fait, avec délicatesse sur ma peau et douceur dans mes cheveux, j'apprécie énormément la sensation de ses doigts qui glissent entre quelques mèches de cheveux, provocants quelques frissons de chaleur grimpant en moi. Mais voilà que cette sensation me quitte peu à peu. Je voulais me concentre sur ses caresses pour enfin arriver à trouver le sommeil, mais l'interrogation s'installe en moi jusqu'à ce que je sente ses doigts me relever le visage afin de m'offrir l'un de ses plus tendres baisers.

Je me perdrais presque dans ce moment de tendresse, mais la sensualité naissante cherche à faire prendre un tout autre tournant à mes pensées bien angoissées et parfois même sombres. Je laisse ma main dévier sur sa hanche alors que celle contre le matelas remonte pour se glisser sur sa joue alors que je me laisse légèrement rouler sur le dos, comme pour l'inviter à me suivre dans mon geste. Ma jambe remonte un peu pour passer derrière celle qu'il vient de glisser entre les miennes, comme par habitude. En à peine quelques secondes, même si ce n'est que pour quelques instants, ma colère contre son acte est mise de côté.

Je prends le temps de respirer, mais surtout pour pouvoir l'observer ne serait-ce que quelques secondes alors que ma main redescend dans le creux de son cou. J'ai peur qu'il fasse ça uniquement parce que je suis stressé, mais en même temps, je n'ai pas envie de l'en empêcher. Malgré ce qu'il peut faire, je n'arrive jamais à lui en vouloir bien longtemps, même si je suis quelque peu rancunier par moment. Je retourne prendre possession de ses lèvres sans plus chercher à comprendre ses actes, voulant simplement profiter de ce moment. De toute façon, je n'arrive pas à dormir alors je préfère avoir l'occasion de m'abandonner à lui maintenant, alors qu'au laboratoire, c'est tout bonnement impossible.

J'émerge doucement de mon sommeil et relève la tête en passant une main sur ma nuque douloureuse. La position dans laquelle j'ai dormi n'est pas confortable du tout, mais il est hors de question que je le laisse seul. Je veux être présent à son réveil, je veux pouvoir me rassurer en voyant ses yeux s'ouvrir après plusieurs jours. Il me manque tellement. Un soupir m'échappe alors que je me redresse pour poser mes lèvres sur celles de mon compagnon avant de me pencher à son oreille pour murmurer quelques mots :

- Bonjour mon ange.

Je me lève ensuite de mon fauteuil pour me diriger vers la salle de bains de cette chambre d'hôpital afin de me passer un peu d'eau sur le visage. J'en ai bien besoin pour me réveiller totalement. Je suis assez paradoxal, je l'avoue car j'ai autant envie qu'il se réveille que de le voir rester endormi. S'il se réveille, je vais devoir lui annoncer une mauvaise nouvelle et je ne veux pas, mais vraiment pas. Qu'y a-t-il de pire à annoncer que la mort de notre bébé ? Rien qu'à cette idée, une larme roule sur ma joue et je la chasse rapidement en prenant une profonde inspiration. Il faut que je sois fort pour nous deux.

Le pire dans l'histoire, c'est que je n'ai même pas pu le voir. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi. Qu'y avait-il de si horrible pour qu'on refuse que je prenne mon enfant dans mes bras ? Je ne vois rien, absolument rien. Tout ce que je souhaite, c'est m'assurer que c'est la vérité. Je veux une preuve que notre enfant est mort, même si les mots de Kazuki-san étaient formels. Je sors de la salle de bains pour retourner m'asseoir sur le fauteuil afin de reprendre sa main dans la mienne pour la caresser tendrement de mon pouce. Je ne sais même pas s'il me sent ou m'entend, mais je n'arrêterais pas de lui parler.

Je sais que ce que je fais est dangereux, mais mon statut me permet de faire certaines choses que je ne pourrai pas faire autrement. Je m'appelle Shim Changmin, et je suis l'un des élus. Les Dieux m'ont destinés à faire de grandes choses mais, pour le moment, je ne veux pas le savoir. Tout ce qui m'importe, c'est ma famille. Enfin, disons plutôt mon meilleur ami, puisque c'est ce que doit être le jeune homme allongé sur le lit qui se trouve au centre de la pièce. Ce monde que je hais tant du haut de mes dix-neuf ans veut m'empêcher d'aimer la personne que mon cœur a choisie, mais je le refuse. Qu'ils se trouvent un autre élu s'ils pensent que je ne suis pas assez bien. Ah non ! Tant que je suis en vie, il n'y en aura pas d'autre, c'est vrai. Et bien, ils m'accepteront comme je suis ou ils se passeront de moi.

Les "Ils", ce sont les dirigeants de notre monde, ces êtres qui se croient plus forts que nous alors que ce n'est pas le cas. Ils imposent des lois qui ne font qu'engendrer haine et mécontentement. Tout ça pour un Dieu qui se dit bon et qui, pourtant, engendre la mort. Le Dieu que je sers ne ment pas au moins. Il garde le royaume des morts et veille sur les esprits des pauvres êtres qui ont eu le malheur de voir le jour sur cette terre. J'espère qu'il veillera bien sur l'âme de notre enfant. Enfin, il faudrait que j'aille au temple pour cela, mais ce n'est pas encore le moment. Il faut d'abord que mon compagnon se réveille.

- Bonjour mon ange.

Comme toujours, cette douce voix me donne un repère dans le temps. J'ai comme la sensation que je ne veux pas sortir de cette bulle dans laquelle je me suis enfermé pour me protéger. Mais de quoi ? Une vive douleur dans mon ventre, comme si un vide profond y avait pris place, me fait me rappeler de la raison… J'avais tellement mal avant et encore davantage maintenant, comme si on m'avait arraché ce à quoi je tenais le plus depuis quelques mois. Il est là, je sais, mais il m'avait offert… je ne sais comment… la possibilité de donner la vie à un petit être doté de son sang et du mien.

Mes doigts glissent sur mes lèvres alors qu'une douceur bien familière vient de les caresser l'espace de quelques secondes. Je regarde un peu autour de moi dans l'espoir de le voir, mais tout est noir. Cet endroit m'inspire la solitude ainsi qu'une si profonde sérénité que je ne veux pas la quitter. Pourtant, plus le temps passe et plus je me sens arraché à cette plénitude. J'ai l'impression d'être entouré de chaleur, comme recouvert d'une couverture, mais pourtant ma peau ne cesse de frissonner. C'est même de plus en plus fort, comme pour me faire comprendre que je ne suis plus le bienvenu dans cet endroit.

Des bruits étouffés parviennent peu à peu à mes oreilles, mais je n'arrive pas à les définir. Pourtant, je devrais les reconnaître, c'est si familier, seulement je n'arrive pas à mettre un nom dessus. C'est mon élément… l'eau ? Cet élément qui m'est si précieux ? Pourtant je ne sens pas l'eau autour de moi. J'aimerai bien. Elle m'apaise tellement quand je ne suis pas dans ses bras à lui.

Je finis par ouvrir péniblement les yeux, comme si ça faisait une éternité que je ne l'avais pas fait, mais je les referme aussitôt, aveuglé par cette lumière un peu trop vive. J'allais porter ma main à mes yeux pour les protéger, mais je sens mon corps tellement lourd. Ai-je si peu de force que ça ? Je suis un soldat, je dois pouvoir y parvenir. Je comprends bien vite que ce n'est pas uniquement dû au poids conséquent de mon corps, mais comme une retenue au niveau de ma main. Je ressens seulement maintenant cette chaleur qui l'enveloppe.

Je tourne la tête vers la silhouette que je distingue à peine après avoir ouvert faiblement les yeux et essaie de prononcer quelques mots, mais tout ce qui parvient à sortir d'entre mes lèvres sont des gémissements de plainte et de douleur mêlées. Je me sens perdu tout à coup. Je ne comprends pas ce que je fais là. Pourquoi cette lumière et la sensation froide de la pièce ont remplacé ce vide et ces ténèbres qui m'enveloppaient il y a tout juste quelques secondes… ou minute… je ne sais pas trop. Le temps est le cadet de mes soucis pour le moment.

Je parviens à utiliser mon autre main pour prendre appui sur le matelas, mais tout effort que je peux essayer fait crier de douleur chacun de mes muscles et chacune de mes articulations, m'intimant l'ordre de rester allonger. Je n'en ferai rien et ne montrerai rien jusqu'à ce que la douleur dans mon ventre se fasse plus lancinante et ma main va s'y presser, comme pour tenter de la faire taire ou de l'apaiser. Je prends tout du moment que la douleur sois moins forte.

Je le trouve étrangement plat. Comment ai-je fais pour ne pas m'en apercevoir plus tôt ? Non, il était bien rond, mais si vide à l'intérieur alors que là, il est totalement plat. Je repousse comme je peux le drap blanc si froid malgré le fait que mon corps soit chaud, puis fronce les sourcils en regardant le bandage qui entoure mon abdomen. Mes doigts glissent alors sur les agrafes qui le maintiennent bien en place et relève la tête en affichant un air plus que perdu, mais il y a tant d'interrogations qui me traversent.

- Mon b…

Ma voix tremblante, étranglée, exprimant la détresse que je ressens, trahit également les sanglots que je prenais pour de simples tremblements. Ma main quitte cette douce chaleur pour se poser sur ma bouche, comme pour me faire taire, puis je baisse vivement la tête, comme pour me cacher et me calmer. Je ne dois pas montrer autant de faiblesses. Qu'est-ce qui me prend ? Ma main quitte à présent mes lèvres pour se glisser dans mes cheveux au niveau de ma tempe en la pressant, comme pris de douleur. Comme si je n'avais pas assez mal, voilà que ma tête se met à me faire souffrir à son tour.

Je n'arrive pas à croire ce qui est en train de se passer sous mes yeux. Je… j'attendais ça depuis déjà plusieurs jours et le fait de le voir se réveiller enfin me fait sourire. Je sais que le plus dur reste à venir, mais ce n'est pas grave. D'ailleurs, mou sourire s'efface rapidement quand je l'entends gémir de douleur alors qu'il tourne la tête vers moi. Je le vois tenter de se relever, mais je suis incapable de le faire se rallonger tout de suite tant je suis surpris de le voir bouger. Quand je comprends ce qu'il est en train de faire, il est trop tard. Je reprends sa main dans la mienne pour la serrer fortement. Je ne supporte pas de le voir souffrir comme c'est le cas en ce moment.

Sa main va se presser sur son ventre et je baisse la tête en poussant un petit soupir. Il va falloir que je lui parle, que je lui avoue que notre enfant n'a pas survécu. Je crois qu'il faut que je lui laisse le temps d'analyser la situation pour que nous puissions en parler. Je me doute bien qu'il ne doit pas avoir les idées très claires après avoir passé tellement de temps à dormir. Par contre, j'attrape rapidement ses doigts qui sont bien trop près des agrafes à mon goût. Il relève la tête et je plonge mon regard dans le sien pour lui montrer mon soutien. Je veux qu'il sache que je suis là et que je le resterais jusqu'à la fin de mes jours.

- Mon b…

Sa voix me serre le cœur et je n'oppose aucune résistance quand il retire sa main de la mienne pour la poser sur ses lèvres. J'ai tellement envie de le rassurer que je le prends dans mes bras alors que je le vois poser sa main sur sa tempe et y presser. Je veux qu'il aille mieux physiquement, car moralement je sais que ça va être dur. Je pose un baiser sur ses cheveux alors que je le serre un peu plus contre moi en caressant tendrement son dos afin de tenter de le rassurer. Mais comment est-ce que je pourrais y arriver alors que je sais que les mots que je vais prononcer vont totalement l'anéantir.

- Je suis désolé mon ange. Il.. il n'a pas survécu…

Malgré ses bras qui m'entourent, je n'arrive pas à me détendre totalement. Je me laisse pourtant aller contre son torse et retire ma main de ma tempe suite à son baiser si chaste sur mes cheveux. Je repose ma tête contre son épaule en me penchant un peu en avant, toujours tiraillé par les douleurs de mon ventre. Il m'a empêché de toucher au bandage qui entoure mon abdomen, mais je profite de mon autre main pour qu'elle retourne le toucher, comme pour me persuader que je ne rêve pas et qu'il est réellement là, ce qui est bien loin de me plaire.

- Je suis désolé mon ange. Il.. il n'a pas survécu…

Mes yeux se sont ouverts en grand et mes lèvres entrouvertes laissent en suspend ma respiration sous l'effet de la surprise. J'ai senti quelque chose se briser en moi, mais ce bruit est comme un souvenir proche, quelques jours tout au plus, comme si j'avais déjà ressenti ça mais que je ne voulais pas y croire. Je sens mon ventre vide, mais je ne ressens pas la mort dans cette sensation. Je ne peux pas croire ses mots. Je dois faire un affreux cauchemar pour qu'il ose prononcer ces mots…

- Non…

Je me sépare de ses bras avec le peu de force qui m'habite et le repousse pour le regarder avec une surprise mêlée de tristesse, puis secoue la tête dans un signe négatif. Je repousse totalement le drap pour découvrir mes jambes nues, provocant un long frisson désagréable de froid dû à cette fraîcheur de la pièce à cause de la blancheur des murs, mais surtout dû à la signification et ces ressentiments qui m'habitent pour ce genre d'endroit. Je me glisse comme je peux jusqu'au bord du lit et pose les pieds sur le sol carrelé si froid, comme le reste de la pièce. Je cherche à peine à me lever que mes jambes ne peuvent supporter le poids de mon corps et je m'effondre au sol, sur mes genoux et les mains pour une unique retenue.

Je sens mon corps trembler sous la faiblesse et le manque de force, mais aussi par les sanglots qui se déversent sur mes joues en larmes que je ne parviens plus à retenir. Je ne veux pas le croire. Je veux voir mon bébé. Laissez-moi le voir…

S'il croit que je n'ai pas senti son geste vers son ventre, il se trompe. Il a de la chance, car je suis totalement incapable de l'empêcher de faire quoi que ce soit. Je me rends bien compte que je viens de dire la chose la plus horrible au monde et sa réaction ne se fait pas attendre. Je me laisse faire quand il me repousse et je m'éloigne un peu pour qu'il puisse me regarder, allant très légèrement caresser sa joue du bout des doigts. Seulement, ma main remonte bien vite sur la couverture. Tout ce que je pourrais faire ou dire n'apaisera jamais ce qu'il ressent, ce que je ressens. J'avoue que j'ai maudit ce scientifique d'avoir osé m'annoncer cette nouvelle.

- Non…
- Je suis désolé, mon ange…

Je baisse la tête en fermant fortement les yeux. J'ai beau sentir le matelas et les draps bouger, je ne veux pas l'empêcher d'agir comme il en a envie. Je serais juste là pour le soutenir autant qu'il en aura besoin. Je me retourne pour regarder ce qu'il fait et, quand je le vois s'effondrer à genoux au sol, je me précipite à ses côtés pour le prendre contre moi afin de le remettre sur ses jambes. Je crois savoir où il veut aller, mais je ne sais même pas où se trouve notre enfant. En plus, je doute qu'après une dizaine de jours, il soit encore là. Je veux pouvoir l'enterrer et confier son âme à Hadès, comme les choses doivent être faites.

Je finis par passer mes bras sous ses genoux pour aller le déposer sur le bord du lit, puis je me mets face à lui, entre ses jambes pour le garder tout contre moi. Je ne veux pas qu'il pleure seul, je veux être là pour lui, même si je dois me montrer fort et retenir mes propres larmes pour le moment. Ça n'empêche pas mon regard d'être triste et ma main qui caresse son dos de trembler légèrement. Mais comment est-ce que les choses pourraient en être autrement alors que nous venons de perdre notre bébé ? Je n'ai jamais vraiment compris comment il était enceint, mais j'ai toujours désiré cet enfant depuis que j'ai appris la nouvelle. Ça me paraissait être un tel cadeau des Dieux que je ne comprends pas pourquoi ils l'ont rappelé si vite à eux.

- Je ne peux pas t'emmener le voir mon ange. Je ne sais pas où il est. Je n'ai pas eu le droit de le voir et ça malgré toutes mes menaces…